La filière de l’agriculture biologique est désormais bien implantée en France et est soutenue par un large circuit de distribution. Selon l’Agence Bio, 60 % des Français déclaraient en 2023 consommer des produits bio une fois par mois, avec pour priorité de se nourrir plus sainement. Ont-ils raison ? Le bio est-il meilleur pour la santé ? Que nous enseignent les études disponibles ? Réponses dans cet article, avec en prime quelques conseils pour être un consommateur éclairé et optimiser son alimentation au quotidien.
L’agriculture biologique : un système de production qui exclut les substances les plus toxiques
Cette filière repose sur des techniques agricoles respectueuses des ressources naturelles, du monde animal et végétal. Elle n’utilise ni engrais ni autres pesticides chimiques et limite les additifs. D’une manière générale, sont bannies les molécules de synthèse, responsables de la pollution des sols et de l’air et que l’on retrouve en bout de chaîne dans nos assiettes.
Pour obtenir la mention « agriculture biologique », les produits doivent répondre aux normes de la convention de l’Union européenne, qui fixe les exigences en termes de production, de transformation, de transport, de stockage et de distribution.
Les acteurs de cette filière sont contrôlés au moins une fois par an par des organismes certificateurs agréés par les pouvoirs publics français, comme Ecocert et Qualité-France.
Le label Agriculture biologique (label AB) est un label français créé en 1985 et suit les critères qualité du label européen. D’après l’Agence Bio, en mangeant un produit biologique, vous êtes assuré qu’il contient au moins 95 % d’ingrédients agricoles certifiés bio et qu’il respecte la règlementation française en vigueur.
Par exemple, s’agissant de la viande, les animaux ne reçoivent ni hormones ni molécules de synthèse. Ils sont nourris avec une alimentation saine, à base de céréales, d’herbes ou de pâturages. Les bêtes doivent bénéficier d’un espace suffisant autour d’elles et avoir accès au plein air. Au sein de l’élevage bio, les animaux ne sont pas « gavés » pour stimuler leur croissance. La viande est plus qualitative et contient moins de graisses saturées, (dont les oméga 6) et d’ingrédients toxiques et plus d’oméga-3, les bons acides gras.
Présenté comme je viens de le faire, le bio serait meilleur pour la santé, ne serait-ce que parce qu’il limite le contact avec les pesticides et autres poisons. Mais cette agriculture n’est pas complètement saine. Elle utilise aussi des pesticides naturels ou d’origine naturelle, et cela ne signifie pas qu’ils ne sont pas toxiques et donc sans risques pour la santé et l’environnement. En Europe, une liste de 77 substances tolérées a été établie, mais pour lesquelles il est conseillé de rechercher des alternatives plus saines quand cela est possible. Une étude réalisée en 2018 par 60 millions de consommateurs sur 74 produits bio a pointé des traces de pesticides dans les aliments bio. Certains dépassent même les seuls définis dans le cahier des charges de référence.
Le bio est-il meilleur pour la santé ? Quels apports de la science ?
L’effet de l’alimentation bio sur l’équilibre et le bien-être est de plus en plus documenté grâce à la recherche. Certaines études sont anciennes, ce qui permet de suivre l’avancée des travaux scientifiques. Les premières menées dans les années 2010 ont créé le doute, car elles s’étaient focalisées sur la teneur en micro et macronutriments et n’avaient pas identifié de différences significatives entre les produits classiques et les autres.
Au fur et à mesure, les protocoles de recherche ont intégré d’autres angles d’analyse comme la présence de substances phytochimiques. Les résultats ont mis en lumière les bienfaits des aliments biologiques, au taux plus élevé en composants phytochimiques, qui sont riches en antioxydants, notamment les caroténoïdes. Le fait qu’ils soient plus abondants pourrait expliquer leur effet protecteur pour la santé. Et cette plus forte quantité en antioxydants serait due au fait que les fruits et légumes (non traités) doivent lutter naturellement contre les agressions et fabriquer en conséquence plus de défenses internes, comme les antioxydants.
L’enquête française NutriNet-Santé
Aujourd’hui, l’étude de référence mondiale est la grande enquête NutriNet réalisée à l’initiative de scientifiques français de l’INRA, l’Inserm et l’Université Paris 13. L’équipe a analysé sur plusieurs années les liens entre nutrition, santé et comportements alimentaires à partir d’une cohorte de plus de 60 000 sujets. La comparaison des systèmes de production biologique et traditionnelle a révélé que le bio serait meilleur pour la santé.
- Les pesticides sont beaucoup moins présents dans les aliments bio, ce qui n’est, en soi, pas surprenant, mais rassure puisqu’ils ne sont pas totalement dépourvus de polluants.
- La probabilité d’être en surpoids ou obèse est plus faible chez les mangeurs réguliers, résultat corrigé par les biais découlant des modes de vie plus sains des adeptes du bio. Ce bénéfice pourrait provenir du fait que les produits biologiques sont moins chargés en substances chimiques qui perturbent le métabolisme normal et favorisent la prise de poids.
- Le bio est meilleur pour la santé, car il réduirait de 25 % le risque de cancers, et encore plus pour les cancers du sein et les lymphomes. La prise en considération d’autres facteurs impliqués dans la survenue de cette pathologie, comme l’hygiène de vie, l’histoire familiale ou les facteurs socio-démographiques, n’a pas généré de biais.
Cette information demande à être confortée par d’autres travaux spécifiques sur la relation entre exposition aux pesticides et cancer, le lien de cause à effet dans la survenue de cette maladie étant toujours délicat à déterminer. Aussi, peu d’études sont encore disponibles à ce jour.
Les scientifiques ont conscience que les consommateurs réguliers de la filière bio se distinguent des autres par des caractéristiques marquées. Ils sont en général issus de catégories socio-professionnelles supérieures, sont diplômés, soucieux de leur bien-être, autant de facteurs positifs pour l’état de santé, mais également sources de biais pour les études.
Être un consommateur averti pour bien choisir les aliments bio
En consultation de naturopathie, il arrive que certains clients pensent avoir une bonne hygiène, car biologique alors que dans la réalité, leur alimentation n’est pas saine. Alors je prends le temps de leur transmettre le message suivant : le bio est meilleur pour la santé, mais pas toujours. Les magasins proposent une offre de qualité, c’est indéniable ; cependant, ils regorgent de produits transformés et ultra-transformés, autrement dit d’aliments « poisons » riches en mauvaises graisses, sucre, sel et additifs chimiques de toutes sortes. On y trouve des chips avec d’huile de palme ou de la pâte brisée sans gluten composée d’huile de tournesol, de palme, d’amidons, de matière grasse, de gomme de xanthane, etc. De quoi faire fuir la naturopathe que je suis.
D’une manière générale, la filière bio a un intérêt aussi pour s’approvisionner en produits les plus bruts possibles. Donc achetez-y de préférence des fruits et légumes, des huiles végétales, des œufs, de la farine pour préparer des crêpes ou une pâte à tarte et rendez vous au rayon traiteur frais qui propose du fromage et de la viande. Sélectionnez des aliments de saison et d’origine locale ; en Bretagne, où je vis, les Biocoop sont très implantés et tissent des liens avec des producteurs à proximité qu’ils mettent en valeur sur leur point de vente. Grâce à de tels partenariats, je mange chaque semaine un délicieux chou fermenté distribué par la Voie Lacto.
C’est devenu un réflexe depuis mes études de naturopathie, je regarde toujours les étiquettes alimentaires des produits que je ne connais pas. Plus la liste des ingrédients est longue, plus je me méfie. Quand j’achète des galettes au sarrasin, j’ai confiance car elles contiennent seulement trois ingrédients bruts (farine de blé noir, eau et sel de Guérande). Alors, faites-en autant lors de vos achats en prenant le temps de lire la composition nutritionnelle sur les emballages.
Je finirai en précisant que certains agriculteurs ne sont pas labellisés par choix, la procédure étant lourde et coûteuse. Pour autant, leur activité est comparable à celle de la filière biologique, voire encore plus stricte. Si vous en avez l’occasion, discutez avec des acteurs locaux pour connaître leurs méthodes de production ou d’élevage.
Pour conclure, le bio est-il meilleur pour la santé ? Nous pouvons l’affirmer sans prendre trop de risques puisqu’un tel régime expose à moins de substances toxiques. Mais les chercheurs ont besoin de conduire de nouvelles études pour mieux comprendre l’impact sur la santé. Personnellement, je mange bio depuis des années et sans avoir les connaissances que j’ai aujourd’hui, j’ai toujours ressenti intuitivement que cette habitude était bonne pour moi. Je sensibilise mes clients à cela tout en ayant en tête que la question financière peut entrer en ligne de compte. Ce n’est pas l’objet de l’article, mais selon les produits, manger bio n’est pas nécessairement plus cher. Chacun agit en fonction de ses priorités. Se nourrir avec des nutriments plus sains est un levier pour limiter la pollution chimique globale que nous subissons au quotidien. Et souvenez-vous, nous n’avons qu’une seule santé ; alors adoptons les meilleurs comportements à notre portée !
« La nature offre à la fois ce qui nourrit le corps et le guérit, émerveille l’âme, le cœur et l’esprit. »
Pierre Rabhi
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