Alors que se nourrir sainement devrait être un acte simple et naturel, nous ne savons plus comment faire. Bien s’alimenter relève du défi et de la vigilance au quotidien. Les repères se sont brouillés tant l’offre alimentaire est devenue dense. Dans son livre Manger vrai, Pamela Ebner, diététicienne et nutritionniste, s’inspire des travaux du chercheur Anthony Fardet et nous guide pour prendre de nouveaux réflexes à partir de la règle des 3 V : Manger Vrai, Végétal et Varié. Découvrez dans cet article les essentiels d’un art de vivre qui conjugue simplicité et santé.
Manger vrai en trois principes clés
1. Éviter le plus possible les aliments ultra-transformés
Si vous n’êtes pas encore familier des notions de vrais et faux aliments (dit ultra-transformés), le livre de Pamela Ebner vous ouvrira de nouveaux horizons et créera peut-être un avant et un après.
Pour bien comprendre de quoi il s’agit : les vrais aliments sont bruts, composés d’ingrédients naturels et peu ou pas transformés. Nos grands-parents en mangeaient grâce aux ressources du monde végétal et animal comme les fruits, légumes, légumineuses, la viande, le lait, les œufs, le riz, etc. Ils cuisinaient à la maison et connaissaient les méthodes de conservation. Leur exemple devrait continuer à nous inspirer ; la modernité a du bon, mais pas toujours, et sur le plan nutritionnel, elle interpelle.
En effet, avec l’industrialisation de la production agricole et alimentaire depuis les années 70, la transformation des aliments s’est accélérée pour répondre aux besoins de la population. À présent, les aliments ultra-transformés représentent plus des deux tiers de l’offre des supermarchés et plus d’un tiers des apports caloriques des Français, de quoi s’inquiéter de l’état de santé de la population du fait de leur dangerosité.
Ce sont des produits de synthèse, ayant subi toutes sortes de procédés industriels et enrichis de substances chimiques pour garantir leur conservation, apporter plus de goût, de texture… Ils sont en général riches en calories, souvent gras, sucrés et/ou salés et font monter la glycémie. Ils n’ont absolument aucun intérêt nutritionnel.
Citons par exemple ces aliments très répandus : pains de mie industriels, cordons bleus, crème glacée, céréales du petit-déjeuner, chips, vinaigrette allégée, nouilles instantanées, bonbons, friandises chocolatées… La liste est très très longue.
Comment faire pour repérer l’ultra-transformation ? Il faut étudier systématiquement les étiquettes des produits et compter le nombre d’ingrédients. Plus de 4 ingrédients doivent alerter. Plus il y a d’ingrédients, plus il faut se méfier et encore plus quand leur nom est obscur. Attention aux allégations trompeuses du type « riche en fibres », « pauvre en sucre », « enrichi en… ».
Deux exemples opposés parlants :
-Conserve de pois chiches (aliment sain)
Ingrédients : pois-chiche, eau, sel de mer
-Nuggets de poulet (aliment poison)
Ingrédients : eau, préparation de viande de poulet, chapelure (farine de blé, levure, sel, épices : paprika et curcuma), peau de volaille, farine de blé, gluten, amidon modifié de maïs. Conservateurs : lactate de potassium et acétate de sodium, dextrose, sel, arômes naturels, dextrine de manioc, épices, colorants : extrait de paprika et de curcumine, poudres à lever : E450-E500. Huile de tournesol et de colza
Qu’en est-il des aliments transformés ?
Ce sont des produits plus sains fabriqués à partir d’aliments frais ou peu transformés. Ils ont subi des transformations légères du type découpe, hachage, mélange, cuisson. Les fabricants y ajoutent du sucre, de l’huile, du sel ou d’autres ingrédients utilisés classiquement en cuisine. Les conserves, le pain frais, le fromage, les poissons fumés en font partie.
Exemples d’aliments bruts ou peu transformés :
- Fruits, légumes et légumes secs
- Oléagineux (non salés, non grillés)
- Œufs (bio)
- Viande (animaux nourris avec de l’herbe idéalement)
- Poissons et fruits de mer
- Huiles végétales, beurre (mais pas de margarine)
- Laitages (mais pas les produits laitiers sucrés et allégés)
- Eau, thé, café, infusion, boissons fermentées, laits végétaux, vin (idéalement bio)
Si vous vous nourrissez de vrais aliments, et qu’ils sont issus en plus de l’agriculture biologique, vous augmentez les bienfaits sur votre santé et la planète.
2. Augmenter la quantité de végétaux dans son assiette
Manger végétal constitue le deuxième axe de la règle des 3V, les végétaux représentant environ 85 % des calories quotidiennes selon le régime proposé par Anthony Fardet. Les 15 % restants reviennent aux produits animaux, soit 2 à 3 portions maximum par jour pour combler les besoins de l’organisme. Pamela Ebner donne quelques repères pour se rapprocher de cette norme : 1 à 2 produits laitiers par jour, 3 portions de volailles, ou de poissons ou d’œufs par semaine et 1 portion de viande rouge par semaine.
Au premier abord, cela peut paraître restrictif, mais le monde végétal offre une grande variété d’aliments. Les voici dans les grandes lignes : fruits, légumes, céréales, légumineuses, oléagineux, huiles végétales, herbe, épices, farine complète, thé, café, infusion…
On retrouve dans cette philosophie le régime flexitarien, qui fait la part belle aux végétaux et limite la viande à une consommation occasionnelle. Il est plutôt facile à suivre, prévient l’apparition de maladies chroniques et a un impact positif sur l’environnement. À condition évidemment de choisir des aliments bruts ou peu transformés pour en retirer tous les avantages.
3. Cultiver la diversité à chaque repas
Manger varié, la 3e règle, implique de consommer toutes les familles alimentaires et au sein de chaque groupe, diversifier également le plus possible les aliments. L’auteure suggère d’atteindre idéalement 30 aliments différents par semaine. Cette diversité fournit tous les nutriments indispensables au bon fonctionnement du corps. La composition des nutriments varie d’un aliment à un autre, d’où l’importance de densifier ses repas et de procéder à des associations bénéfiques, comme celle des protéines végétales avec des céréales pour atteindre l’équilibre protéique.
La richesse du Manger vrai permet de conserver les traditions culinaires, honore le fait-maison, et la saveur des aliments.
Pamela Ebner agrémente son livre de menus et recettes en guise d’inspiration pour guider le consommateur.
Une relative tolérance aux écarts alimentaires
Elle est consciente aussi de la place de la nourriture dans la vie de chacun ; appliquer le Manger vrai de façon stricte n’est pas son parti-pris, ce qui laisse la porte ouverte à quelques entorses. Les produits ultra-transformés ne sont pas à bannir complètement. Je partage aussi cette vision : aucun aliment n’est bon ou mauvais, tout est question de quantité et de fréquence. Mieux vaut se faire plaisir de temps en temps que d’entretenir des frustrations. Vous connaissez la règle des 80/20 ? Je la rappelle souvent en consultation de naturopathie pour introduire un peu de légèreté : elle repose sur 80 % d’alimentation « sérieuse » et 20 % libre pour continuer à déguster ses péchés mignons sans culpabilité. Autrement dit, vous mangez comme vous voulez 3 à 4 repas par semaine, à condition que le reste du temps, l’hygiène reste saine.
Pourquoi se nourrir de vrais aliments s’impose ?
Il en va de la santé, je dirais même de la santé publique et de notre espérance de vie. Les scientifiques comprennent mieux à présent les causes de l’explosion des maladies chroniques dans le monde ; les graisses puis les glucides raffinés ont été dénoncés, mais le plus grand danger selon les chercheurs réside dans le degré de transformation des aliments. Les études ont mis en lumière une corrélation entre une nutrition majoritairement ultra-transformée et la survenue de maladies dites de civilisation (obésité, maladie cardiovasculaire, diabète, cancer, stéatose hépatique…).
Outre les dégâts sur la santé, il faut aussi savoir que l’alimentation ultra-transformée entretient la croissance d’acteurs agro-industriels qui est loin d’être vertueuse pour l’environnement. Elle génère de la pollution, nuit à la biodiversité, pollue les océans, écarte les petits producteurs et paysans, entraîne une déforestation, etc. On nous parle tous les jours d’urgence climatique, allant jusqu’à culpabiliser les citoyens, mais étonnamment assez peu de la responsabilité majeure de ces industriels !
Quoi qu’il en soit, à l’image du colibri qui « fait sa part », si l’on veut s’opposer à ce phénomène délétère, libre à nous d’adopter une alimentation responsable dans le respect de la nature et d’honorer le vrai chaque jour dans sa cuisine. Cela devient presque un acte politique et de résistance.
Pour conclure
Ce livre fournit une mine d’informations sur les grands principes du Manger vrai, dans une approche très pragmatique pour accompagner le lecteur dans son apprentissage.
En résumé, il faut retenir que ce régime entretient un courant vertueux pour le bien-être des hommes, des animaux et de l’environnement. C’est la méthode la plus protectrice qui soit, mais elle n’est pas évidente à appliquer au quotidien, surtout quand on n’est pas chez soi. Prendre conscience de la toxicité de l’alimentation moderne est une première étape avant d’enclencher une modification profonde. Je n’aurais pas écrit ces lignes, il y a encore quelques années ; je ne mesurais pas la profusion impressionnante des faux aliments. Je n’étais pas vraiment informée et je ne m’en préoccupais pas tellement ; par la force des choses, je m’y suis intéressée pour retrouver une énergie que j’avais perdue. Lors de mes études de naturopathie, j’ai compris l’impact concret d’une mauvaise alimentation sur le corps et j’attire l’attention de mes clients sur cette dimension. J’espère que cet article vous aura sensibilisé également et incité à revoir dès demain votre liste de courses !
Livre : Manger Vrai, Pamela Ebner, Thierry Souccar Editions
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